J.M. KEYNES ET LES RÉPARATIONS :
UNE HISTOIRE REVISITÉE
Stephen A.
SCHUKER
Certains observateurs considèrent toujours que l’opposition passionnée de John
Maynard Keynes au Traité de Versailles fut basée sur une analyse économique digne de foi
ou au moins crédible.
Pourtant, tout au long des années 1920, Keynes joua dans l’ombre
un rôle hautement partisan dans le grand combat diplomatique se jouant alors sur la question
des réparations d’après-guerre.
Il suggéra dans ses mémoires n’avoir plus jamais eu
l’occasion de rencontrer en tête-à-tête le banquier de Hambourg Carl Melchior après le
mois d’octobre 1919.
Utilisant des sources allemandes restées jusque-là inexploitées par les principaux biographes de Keynes, cet article montre, tout au contraire, que la relation intime entre les deux hommes continua bien au-delà de cette date.
Melchior introduisit Keynes dans les plus hauts cercles gouvernementaux du Reich. L’économiste britannique apporta son soutien à l’hyperinflation allemande de 1922-1923 pour des motifs politiques et contribua à l’élaboration de la grande note allemande sur les réparations de juin 1923.
Some observers still regard John Maynard Keynes’ polemic against the Treaty of
Versailles as serious economic analysis.
In fact, Keynes continued to play an unacknowledged partisan role in reparation diplomacy during the 1920s.
He suggests in a memoir that he never saw the Hamburg banker Carl Melchior alone again after October 1919.
Using German sources not exploited by Keynes’ principal biographers this analysis shows that the intimate relationship continued.
Melchior drew Keynes into the highest governing circles of the Reich. Keynes supported the 1922–1923 German hyper-