L’interprétation évolutive des conventions internationales de protection des droits de l’homme
Contribution à l'étude de la fonction interprétative du juge international
Julie Ferrero
Quatrième de couverture
Les conventions internationales de protection des droits de l’Homme ont été élaborées au début de la seconde moitié du XXe siècle. Or, le champ matériel de ces traités est étroitement connecté aux réalités humaines, elles-mêmes en constante évolution. Les développements technologiques, sociaux, économiques ou scientifiques peuvent en conséquence avoir des implications directes sur l’exercice des droits et libertés fondamentaux. L’interprétation évolutive de ces instruments, consistant à les envisager « à la lumière des conditions actuelles », est alors devenue courante dans la pratique des juridictions spécialisées, bien qu’elle soit parfois envisagée avec méfiance. Absente des règles d’interprétation du droit international formulées dans la Convention de Vienne sur le droit des traités, cette modalité interprétative intrigue dans la mesure où elle conduit le juge à s’écarter parfois explicitement du texte de l’accord et donc de la volonté des parties. Pour autant, face à l’enjeu que représente le maintien de l’effectivité du droit dans le temps, force est de constater que l’application de ces conventions impose leur actualisation. L’interprétation évolutive invite par conséquent à une réévaluation de la fonction interprétative du juge international, entre son encadrement théorique traditionnellement strict et les exigences empiriques du droit international contemporain.
À partir de cette méthode particulière, cette thèse vise à démontrer que le juge international de protection des droits de l’Homme bénéficie d’une ample marge de manœuvre dans le processus interprétatif qui, sans impliquer une quelconque exclusivité de la méthode aux droits de l’Homme, tient essentiellement aux conditions dans lesquelles il exerce son office. Cette latitude est en réalité indispensable et lui permet de contribuer à une adaptation quotidienne du droit international devenue vitale. La mise au jour de la véritable nature de ses fonctions atteste de la part de créativité inhérente à l’activité interprétative et participe à la remise en question de la fiction classique de l’application mécanique du droit au fait, strictement encadrée par les limites du consensualisme. Plus encore, les implications de l’interprétation évolutive conduisent à lever le voile qui masquait jusqu’alors les fondements et la légitimité du pouvoir du juge et permettent d’en proposer des perspectives d’amélioration.