Les défis de l’extension du plateau continental


La consécration d’un nouveau rapport de l’État à son territoire


Virginie J.M. Tassin


Quatrième de couverture

L’extension du plateau continental est au cœur de l’actualité. Avec près de 105 revendications déposées auprès de la Commission des limites du plateau continental en juin 2012, l’extension intéresse les États, parties ou non à la Convention de Montégo Bay.
L’intérêt assez soudain que ces derniers ont porté depuis 2001 à la partie du plateau continental au-delà de 200 milles marins offre une opportunité unique de se pencher sur l’impact de cette extension au sein du nouveau droit de la mer, sous l’angle plus particulier de l’obsession territoriale qui anime les États. L’apparition et l’évolution du plateau continental et de son extension au sein du droit de la mer représentent une avancée importante dans la perception de l’espace marin et de son encadrement afférent.
Motivés par des considérations économiques et politiques, les États côtiers mènent une course à l’extension du plateau continental.
Mais cette dernière, leurrée par les promesses incertaines de la richesse des fonds marins convoités, n’est pas guidée par les seuls intérêts égoïstes nationaux.
Elle mêle habilement l’articulation de l’intérêt commun et de l’intérêt spécial des États, corrigeant le régime du plateau continental qui apparaît originellement comme profondément discriminatoire, géographiquement et financièrement.La création de la zone du plateau continental étendu par le nouveau droit de la mer opère un bouleversement important dans l’équilibre du régime juridique du plateau continental.
D’un plateau continental unique aux limites incertaines, le plateau continental est désormais divisé en deux, s’étendant en deçà et au-delà de 200 milles marins.
Cette distinction crée une césure qui met en question le rapport entre la procédure d’extension du plateau continental et les droits de l’État côtier, consacrés comme ipso facto et ab initio.
La nouvelle définition du plateau continental et l’insertion du principe de prolongement naturel du territoire terrestre permettent ainsi de révéler le lien juridique existant entre l’État et cette zone sous-marine ipso jure.
Ce lien n’est pas celui des ressources, mais bien celui du territoire, révélant au grand jour le plateau continental comme un territoire accessoire de l’État côtier. Au cœur de la mise en œuvre de la procédure d’extension, la Commission des limites du plateau continental s’est vue confier un rôle inédit et essentiel à la bonne conduite de la procédure d’extension est cependant difficile.
Sa mission se heurte cependant à la fois au pouvoir très sauvegardé de l’État côtier dans la définition des limites de son territoire, mais aussi aux limites de son propre mandat.
La participation volontaire des États au sein de cette procédure d’extension démontre la symbolique et le rôle de cette procédure de définition au sein du droit de la mer.
La limite extérieure du plateau continental n’est pas seulement une définition d’une simple limite unilatérale, elle se révèle être une opération multilatérale et le laboratoire préparant l’établissement d’une frontière émergente.
Cette frontière est d’autant plus importante qu’elle est d’une nature inédite.
Elle oppose pour la première fois l’intérêt de l’État côtier à celui de l’humanité représenté par l’Autorité internationale des fonds marins, garante du patrimoine commun de l’humanité.

À propos de l'auteur

Virginie J.M. Tassin est Docteur en droit de l’Université Paris I Panthéon - Sorbonne

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